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dimanche 20 novembre 2011

Bénarès

Ah Bénarès... Cette ville mythique autant pour les hindous que pour les voyageurs de tous horizons fascine depuis des siècles.

Varanasi (le nom de Bénarès en Hindi) est en effet une des plus anciennes villes encore habitée du monde. On date sa fondation aux environs du 7ème siècle avant JC. Ville sacrée pour le Gange qui la borde et qui lave les péchés, pour son apparition dans divers récits de l'hindouisme et du bouddhisme, elle détient encore de nos jours un puissant pouvoir religieux pour les hindous, pour qui y être incinéré après la mort garantit la salut éternel. C'est tout simplement une des cités les plus mythiques d'Inde, et bon nombre de touristes viennent gouter à son atmosphère si chargée de mysticisme.


Un pitch comme ça nous gonflait d'enthousiasme à l'idée de découvrir enfin Bénarès. Et pourtant, le premier contact ne fut pas exactement celui attendu...

Après un long trajet en train, serrés comme des sardines dans un wagon allègrement surbooké, nous arrivons aux alentours de 21h00 à la gare ferroviaire, où le traditionnel comité d'accueil composé de chauffeurs de rickshaws surtaxés et autres rabatteurs d’hôtels nous attend de pied ferme. Ayant évacué assez rapidement les arnaqueurs de service, nous chargeons nos bagages et posons nos fesses sur une banquette de vélo-rickshaw, dont le chauffeur nous explique rapidement la situation : "Vous avez de la chance, ce soir c'est Diwali, la fête des lumières, il y a beaucoup d'animation en ville, c'est une grande fête ! Par contre à cause de l'événement plusieurs rues sont bloquées à la circulation, c'est pourquoi vous devrez marcher quelques minutes jusqu'à votre hôtel. Moi je ne pourrai pas passer."
Par "quelques minutes", il fallait entendre une heure à se frayer un chemin à travers une foule compacte au milieu de ce gros bordel festif. Pour vous donner une idée, imaginez deux japonais un peu paumés débarquant avec leurs sac à dos au milieu des Champs Elysées le soir du réveillon du nouvel an...


Bref, nous arrivons passablement fatigués dans le coin où le guide nous recommandait quelques hôtels sympas, mais qui étaient évidemment tous archi-complets pour l'occasion. Nous finissons par nous rabattre sur le derner de la liste qui dispose d"une chambre libre très économique (8m² pas super clean, mais c'est tout ce qu'on a trouvé).

Le patron nous explique qu'il va eut-être libérer une chambre plus spacieuse vers 22h00 (...) et nous invite à patienter au resto de l'hotel, situé tout en haut sur une belle terrasse dominant la ville. C'est alors qu'une touriste nous interpelle en descendant dans le hall de réception. elle est suivie par un jeune local et est visiblement paniquée : "j'ai besoin d'aide, je cois que cet homme a mis de la drogue dans ma boisson et je ne me sens pas bien du tout, il faut que je voie un médecin !".
Regards inquets échangés avec le patron de l'hotel, qui se détache immédiatement de la situation dès qu'il apprend que la jeune fille n'est pas pensionnaire dans son établissement : "retournez à votre hotel, ils se feront un plaisir de s'occuper de vous". Un bon exemple d'altruisme à l'indienne...
La malheureuse se tourne vers nous encore plus paniquée, et nous demande de l'aider parce qu'elle ne sait plus quoi faire et qu'elle commence vraiment à se sentir mal. Nous décidons alors de nous occuper d'elle, et je propose de la raccompagner à son hôtel pendant que ma chère et tendre reste au nôtre en attendant la libération éventuelle d'une chambre plus correcte. En sortant de l’hôtel l'indien qui accompagnait la jeune fille nous rattrape et tente de se justifier d'un air autoritaire, en expliquant qu'il n'a rien à voir avec le brusque changement d'humeur de la demoiselle, et qu'il a lui aussi pris une boisson dans le même restaurant qu'elle sans rien ressentir d'anormal, d'où ses soupçons envers cette menteuse qui l'accuse de l'avoir droguée. Je sors de ma panoplie de série américaine mon regard le plus menaçant, et lui explique qu'il pourrait avoir à faire à moi s'il continue de nous suivre de la sorte, ce qui a pour effet de le faire disparaitre en l'espace de quelques secondes (ça na marche pas à tous les coups). Puis nous nous dirigeons vers les berges du Gange, les fameux "gaths", pour retrouver la pension de la demoiselle qui commence à me raconter son histoire. Pour son premier voyage en solitaire, cette jeune fille d'origine suisse a choisi l'Inde, et a déjà passé quelques semaines dans le pays, dont une partie dans un ashram. Ce soir là elle avait soif, et a rencontré un jeune homme sympathique et avenant, se prétendant guide touristique qui l'a entrainée pour aller boire un lassi avant d'aller diner sur la terrasse de notre hotel. Pas très sérieux comme comportement mademoiselle...

Nous nous enfonçons dans la foule et longeons le fleuve pendant près d'une heure, entre bousculades, cohues, liesse populaire et cet air de ferveur qui se dégage des célébrations hindoues. Diwali ajoute aux grands escaliers longeant le Gange des milliers de petites flammes illuminant les berges, c'est assez féérique, mais nous n'avons melheureuseùent pas trop le temps de nous arrêter pour admirer le paysage, la fille plane un peu et s'inquiète de son état, qui n'empire pas tant que ça finalement. Bloqués un instant par une foule plus compacte qu'ailleurs, je sens sur ma gauche une forte source de chaleur et me retourne pour constater qu'un cadavre est en train de se consumer à 2 mètres de moi, allongé sur un bucher. "C'est un des gaths de crémations" me commente l'helvétique qui continue à planer un peu. Arrivés à son hôtel, nous allons trouver un de ses camarades de voyage français à qui j'explique la situation. Après m'être assuré qu'elle se trouvait entre de bonnes mains, je m’éclipse rapidement et entreprends le chemin du retour. J'arrive finalement vers 23h30 à notre hôtel, épuisé, pour retrouver ma chère et tendre sur la terrasse et mettre fin à toutes les hypothèses macabres que l'inquiétude lui avait inspirées, allant de ma noyade dans le Gange au piège tendu par des racketteurs toxicomanes, en passant par l'odieux stratagème d'une prétendue touriste pour m'entrainer dans une ruelle sombre et me dépouiller à l'aide de ses complices. La fête de Diwali est terminée, nous avalons notre diner rapidement et allons nous coucher dans une chambrette médiocre pour achever cette première journée à Bénarès qui aurait pu mieux se dérouler...

Demain est un autre jour disait le sage, et notre deuxième jour commence par une merveilleuse ballade sur les bords du Gange, vidés de la foule de la veille et illuminés par un grand soleil. Nous prenons notre temps pour parcourir les quelques kilomètres le long desquels j'avais couru la veille avec la suisse accrochée au bras, et là c'est une toute autre vision qui s'offre à nous : Bénarès est une ville hors du commun qui nous charme tout de suite.














Son principal attrait ce sont bien sûr les célèbres gaths, qui voient défiler la vie des habitants et pèlerins venus sur les rives du Gange pour se purifier, se laver, laver leurs bêtes, leur linge, prier, flâner, jeter leurs ordures et même brûler leurs morts à la vue de tout le monde. Toute cette activité offre un spectacle fascinant et parfois perturbant. Un détail attire mon attention : je crois que c'est la première fois que je visite une ville qui ne s'étend que sur une seule rive d'un fleuve. De l'autre côté du Gange : rien, pas une construction, et la brume matinale nous donne même l'illusion que nous sommes au bord de la mer. Une atmosphère très spéciale se dégage de ces lieux. Beaucoup de sérénité, mais aussi de mysticisme, car les prêtres, sages et autres ascètes y sont nombreux, de même que les pèlerins effectuant des offrandes au fleuve sacré. La ville étant très touristique, il faut quand même se méfier des rabatteurs et faux prêtres qui nous sollicitent à tout bout de champ.


Ici sont entreposés les quantités impressionnantes de bois destiné à la crémation de quelques 500 à 900 corps par jour. Les photos étant logiquement interdites sur les lieux même de crémation, vous devrez vous déplacer vous-même à Bénarès pour apercevoir à ce rituel quelque peu troublant.



Le lassi est une magnifique invention culinaire indienne. Et ici, ce breuvage frais à base de lait fermenté trouve son spécialiste chez "Blue Lassi", une minuscule échoppe populaire chez les touristes, avec son adorable patron qui nous a régalés de son sourire et de ses merveilleux lassis.





















Le soir, les gaths s'enveloppent d'une clarté ocre à la lueur des éclairages publiques, transformant la ville brumeuse en un tableau fantomatique. Les cérémonies continuent de plus belle à la nuit tombée, animant certaines berges de chants et de rites religieux.










Nous finirons la journée sur la terrasse de notre hôtel, au son d'un petit concert de musique traditionnelle, pour clôturer cette dernière soirée à Bénarès qui, vous l'avez compris, nous a vraiment conquis.




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